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Les voyages sèment la zizanie

Le Coin du Ronchon
La Nation n° 2200 6 mai 2022

Avec l’arrivée des beaux jours, on recommence à penser aux voyages.

Cette année, la tendance n’est pas aux plages paradisiaques, ni aux alpages verdoyants, ni à l’exotisme de la brousse ou de la jungle, ni même aux lointaines étendues arctiques ou antarctiques. Non, cette année, la destination à la mode est l’Ukraine.

Outre des soldats, des mercenaires et des espions d’un peu partout, qui tous y revendiquent crânement leur présence sur les réseaux sociaux et dans la presse, ce sont désormais les stars de la jet set politique qui s’y pressent et qui, surtout, tiennent à faire savoir qu’ils y sont allés en bravant tous les dangers. Le pauvre président Zelensky ne sait plus où donner de la tête, tant affluent les demandes d’entrevues: après les hauts fonctionnaires des Etats-Unis et des organisations internationales, on voit aujourd’hui défiler à Kiev les délégations parlementaires d’à peu près tous les Etats alignés sur la politique américaine.

Cela explique que plusieurs représentants du Parlement helvétique s’y sont aussi rendus, dont la présidente du Conseil national, Mme Irène Kälin, écologiste argovienne. Celle-ci a toutefois dû essuyer une légère contrariété: elle aurait souhaité compléter son escorte journalistique personnelle par une escorte policière officielle, mais on la lui a refusée car les fonctionnaires de la police fédérale n’éprouvaient, eux, aucun empressement à aller s’afficher au milieu d’une zone de guerre.

Mme Kälin a heureusement pu médiatiser sa déception, tout en insistant sur les motivations désintéressées de son voyage: «Afficher ma solidarité et mon humanisme sur place, c’est le minimum que je puisse faire.» (Il est à craindre que ce soit aussi le maximum.) Pour ce qui est d’afficher son humanisme, l’exercice est réussi puisque «le Blick a réalisé une couverture pléthorique des moindres faits et gestes de l’Argovienne, de sa montée d’avion à son retour en Suisse». C’est en ces termes pleins d’empathie que le quotidien Le Temps relate le travail de ses chers confrères alémaniques, tandis qu’une autre partie de la presse d’outre-Sarine juge sévèrement le «pathos» qui imprègne le récit de Mme Kälin – un agacement d’ailleurs partagé par certains collègues de cette dernière au Parlement.

Nous voyons ainsi comment, au sein de la politique et de la presse helvétiques, les voyages (avec un «V») sèment la zizanie (avec un «Z»): V et Z, les deux lettres maudites des blindés du maître du Kremlin. Le coupable, c’est lui.

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