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Golgotha de Frank Martin en disques et en concerts

Frédéric Monnier
La Nation n° 1885 26 mars 2010
Tous siècles confondus, l’oratorio Golgotha de Frank Martin est un des sommets de la musique sacrée; le compositeur genevois a en effet su s’élever à la hauteur des Passions de Bach; le style et l’esthétique sont évidemment fort différents, mais l’expression de la foi est aussi forte et sincère chez l’un que chez l’autre. Aussi faut-il accueillir avec le plus grand intérêt toute nouvelle parution discographique de cette oeuvre. Paraissant au moment le plus approprié de l’année liturgique, l’enregistrement dirigé par Daniel Reuss réunit un choeur hollandais (cette précision n’est pas anodine: Martin a vécu de 1946 à sa mort aux Pays-Bas et sa femme est hollandaise) et, chose plus surprenante, un choeur et un orchestre symphonique estoniens. Cette version déploie d’emblée de belles qualités: des choeurs à la prononciation française remarquable, un orchestre qui rend justice à la partition, des solistes dans l’ensemble plus qu’honorables et une prise de son claire et aérée, que demander de plus? Il nous manque à vrai dire ce qui fait le prix de l’ancienne version de Robert Faller supervisée par le compositeur lui-même et enregistrée à la cathédrale de Lausanne en 1968: une ferveur religieuse intense. Pour préciser notre sentiment, il n’est que de comparer les deux versions dans une des pages les plus inspirées de la partition, le Calvaire, où, nous dit le musicographe Harry Halbreich, «la musique […] n’est plus que le prolongement de notre angoisse à la contemplation muette de l’accomplissement terrible de la Parole, cette Parole que nos lèvres – celles des chanteurs – articulent sans parvenir à lui donner une incarnation sonore». Là où le choeur de l’Université de Lausanne murmure le texte en nous glaçant d’effroi, les choeurs hollandais et estoniens restent trop superficiels, ne parvenant pas à susciter l’émotion. Par ailleurs, il faut bien avouer que, malgré leurs qualités, les solistes du nouvel enregistrement n’égalent pas ceux de Faller (Tappy, Huttenlocher, sans oublier Pierre Mollet, un des grands Pelléas des années 50-60, ici Jésus bouleversant d’humanité en dépit d’une voix sur le déclin). Malgré ces réserves, nous disposons là d’une version moderne tout à fait recommandable de ce chef-d’oeuvre. [Coffret de deux disques paru chez l’éditeur Harmonia Mundi, HMC 902056.57]

Dans la foulée, nous ne pouvons évidemment passer sous silence l’interprétation de ce même Golgotha les 29 et 30 mars prochains (20h) à la cathédrale de Lausanne, dans le cadre d’une grande manifestation intitulée La Passion au croisement des regards, qui a débuté en février déjà et qui met notamment en parallèle la Passion selon saint Matthieu de Bach (laquelle est donnée dans le même lieu les 27 et 31 mars à 20h) et l’oeuvre de Martin. On doit tout particulièrement saluer l’audace de ces deux jeunes chefs vaudois talentueux que sont Nicolas Reymond et Romain Mayor qui ont entraîné dans ce projet ambitieux les différentes chorales qu’ils dirigent. L’exécution de cette oeuvre étant rare en Pays de Vaud (à notre connaissance, la dernière fut celle de Michel Corboz en... 1994!), c’est donc un événement musical à ne manquer sous aucun prétexte. [Tous les renseignements et informations sur le site internet: www.passionregard.ch]

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