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La «Métropole lémanique» ou le Traité de Prangins

Jean-Michel Henny
La Nation n° 1933 27 janvier 2012

Le 9 novembre dernier, les Conseils d’Etat des Cantons de Vaud et Genève ont signé au Château de Prangins un accord destiné à formaliser leur collaboration «à l’échelle métropolitaine», comme ils le déclarent en préambule. L’objectif général est d’assurer la compétitivité économique des deux cantons et de la région lémanique tout en y maintenant une qualité de vie élevée.

On est loin de la fusion préconisée naguère par certains. On est loin aussi, heureusement, des chamailleries qui ont souvent agité les relations entre des voisins parfois en concurrence pour accueillir les sièges internationaux de sociétés prestigieuses ou, plus prosaïquement, des contribuables intéressants.

Dans les faits et depuis quelques années, les deux cantons collaborent de façon efficace dans plusieurs domaines. Ils ont réussi à adopter une position commune dans le cadre de leurs discussions avec la Confédération, en particulier en matière de transports par route et par rail. Aujourd’hui, ils doivent constater que la prospérité suscite aussi des difficultés.

L’accroissement de la population des deux cantons est impressionnant. Entre 2000 et 2010, 142000 personnes s’y sont établies; c’est 14% de plus, alors qu’il n’y en a eu «que» 9% de plus pour la Suisse. Les exportations se sont accrues de 88% (47% pour la Suisse) et les emplois ont augmenté de 16,2% (10,5% pour la Suisse). A Genève, un emploi privé sur trois est lié aux multinationales alors que, dans le Canton de Vaud, il y a près de quarante sièges mondiaux ou européens d’entreprises multinationales. Cela permet à Vaud et Genève d’être parmi les huit cantons qui contribuent positivement à la péréquation intercantonale. Ils versent à eux deux 20% de l’impôt fédéral direct.

Entre 2000 et 2010, le nombre de passagers de l’aéroport de Cointrin a augmenté de 50%. Dans les universités de Genève et Lausanne et à l’Ecole polytechnique, il y a 35000 étudiants, soit 27% du total suisse.

Les étudiants, les employés des sociétés privées, les fonctionnaires internationaux et les consommateurs se déplacent. Les flux de pendulaires enflent, font déborder les trains et créent des bouchons sur les autoroutes. La construction de logements n’arrive pas à suivre et les prix de l’immobilier s’envolent. L’aménagement du territoire se complique sérieusement.

En 2009 déjà, les deux Conseils d’Etat ont signé une convention sur les infrastructures d’importance suprarégionale et ont décidé de préfinancer certains investissements en matière de transports, de centres d’expositions, de culture et pour l’aéroport. Il y a aussi eu un accord avec les CFF et l’Office fédéral des transports pour le développement de l’offre sur la ligne entre Lausanne et Genève-Aéroport.

Le «Traité de Prangins» n’est donc pas une nouveauté. Il sert à mieux définir un cadre juridique adapté à la nouvelle collaboration entre les deux cantons. Il pourrait aboutir, cette année encore, à la création d’une association au sens du Code civil pour permettre la participation de partenaires tiers, comme les communes, ou même certaines entités territoriales françaises.

A titre de mesures immédiates, les Conseils d’Etat engagent des actions communes de lobbying à Berne, des opérations de relations publiques et de communication, la création d’une statistique métropolitaine, des travaux pour une étude sur les coopérations en matière d’enseignement supérieur, ainsi que pour vérifier les synergies possibles entre les fédérations sportives et les organisations internationales.

C’est d’abord en matière de mobilité que les cantons vont intervenir pour doubler la capacité en places assises dans les trains entre Lausanne et Genève, permettre la cadence au quart d’heure sur les réseaux régionaux et apporter des solutions pour les deux noeuds ferroviaires d’importance que sont Genève et Lausanne. Pour la route, il y aura le contournement de Morges pour lequel un choix définitif devrait intervenir en 2012, d’éventuelles nouvelles jonctions autoroutières autour de Lausanne, la suppression du goulet de Crissier ainsi que ceux du Vengeron-Coppet et de Coppet- Nyon. Pour Genève, il s’agira de la traversée du lac. A l’heure actuelle, trois variantes sont examinées par l’Office fédéral des routes. Cette traversée devrait se réaliser dans le cadre du programme des routes nationales.

Contrairement à ce que pourrait suggérer le titre de l’accord, le reste du Canton n’est pas négligé ou ignoré. Il s’agit plutôt de résoudre les problèmes suscités par le développement très rapide de l’arc lémanique entre Lausanne et Genève. Cette prospérité profite à l’ensemble du Canton.

Les associations économiques sont étroitement associées à la mise en oeuvre de cet accord. Il faut s’en réjouir. On peut également relever que cet accord est de nature pragmatique, qu’il s’agit avant tout de formaliser une collaboration déjà en cours, et que les signataires ont évité l’écueil de la création d’une usine à gaz avec de multiples commissions, comités, conseils consultatifs, etc.

Il reste à espérer que les communes situées entre Lausanne et Genève, directement et particulièrement concernées par les problèmes à la base de l’accord, seront associées dans la mesure adéquate à la réflexion et aux décisions à prendre.

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