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Escamotage fiscal

Cédric Cossy
La Nation n° 1951 5 octobre 2012

Les autorités vaudoises ont présenté la semaine dernière le budget 2013 de l’Etat de Vaud. Dépenses et recettes s’équilibrent à 8,5 milliards, malgré une hausse de près de 4,8% de dépenses. Les investissements sont aussi en hausse. Le degré d’autofinancement est toutefois insuffisant pour couvrir leur entier. La dette va donc augmenter de près de 250 millions à 1,68 milliard.

M. Broulis a pris ses airs préoccupés de circonstance pour appeler à la prudence. Il a dressé la liste des nombreuses menaces extérieures qui planent telles des oiseaux de proie sur la bourse dodue du Canton: réforme des caisses de pension, financement de la politique fédérale des transports, diverses initiatives concernant l’imposition ou l’allocation de celle-ci, etc.

Un dépouillement un peu plus attentif des chiffres et des rubriques révèle quelques sujets d’étonnement ou de préoccupation. Les revenus sont annoncés en hausse de 4,6% relativement au budget 2012. Sur la même base de référence, les recettes fiscales grimpent de 2,9%; des parts augmentées à diverses recettes fédérales, aux dividendes de la BNS, mais aussi une ponction supplémentaire de 27 millions auprès des communes pour la facture sociale complètent cette augmentation.

Mais la comparaison avec les comptes 2011 réserve la première surprise: les recettes prévues en 2013 – surtout les impôts – sont inférieures aux recettes réelles de 2011! Or, les deux budgets 2012 et 2013 tablent sur des progressions respectives de 3,1% et 2,9%. Nous sommes donc prêts à parier que les recettes fiscales 2013 dépasseront les prédictions budgétaires de près de 6%. Notons que la différence correspondante, soit environ 300 millions, est exactement du même ordre de grandeur que l’excédent de bénéfice des années 2007 à 2011 relativement au budget. On nous ment depuis longtemps sur la progression des revenus.

Cet escamotage des rentrées a-t-elle aidé à contenir l’appétit du nouveau Gouvernement à majorité rouge-verte? Nous en doutons, puisque une augmentation de plus de 5% (+143 millions) des dépenses allouées aux domaines santé / social est prévue. Ces deux postes représentent désormais 41% des dépenses de l’Etat, alors que cette part n’était «que» de 33% en 2008. C’est une progression peu réjouissante pour cinq années conjoncturellement favorables: à quelle catastrophe financière devrait-on s’attendre si la situation économique du Canton se péjorait sérieusement?

La troisième surprise vient d’un petit coup de pouce de 94 millions pour recapitaliser la caisse de pension de l’Etat de Vaud, ceci vraisemblablement pour cacher le misérable taux de couverture que risque de révéler l’adaptation aux nouvelles normes légales fédérales. Nous n’avons rien contre une recapitalisation partielle de la CPEV par l’Etat, qui y tient le rôle d’employeur. Nous attendons par contre qu’un effort symétrique soit demandé aux employés, comme c’est la pratique dans toutes les caisses de pension privées.

Le budget prévoit la création de postes correspondant à 236 équivalents temps plein (ETP) en 2013, une progression du même ordre de grandeur que l’évolution démographique. Si l’on salue le renforcement des effectifs policiers (+ 30 ETP sans la reprise des policiers communaux dans le cadre de contrats de prestation) et pénitentiaires (+ 56 ETP, principalement liés au nouveau service pénitentiaire pour mineurs à Palézieux), on s’étonne de la nécessité de 118 ETP supplémentaires dans l’enseignement. La mise en place de la LEO ne sera donc pas un exercice financièrement neutre.

On peut se réjouir du montant de 340 millions prévu pour les dépenses brutes d’investissement. Il convient toutefois de relever que, même si ce ne sont pas les projets qui manquent, il n’est pas toujours possible de dépenser l’entier d’un budget ambitieux: ce fut notamment le cas en 2011, suite à des retards pris dans la planification des investissements hospitaliers et universitaires.

Le budget 2013 réserve certainement d’autres surprises. De manière générale, l’augmentation significative (+4,6%) des charges d’exploitation de l’Etat est préoccupante: la progression est de plus du double de celle du PIB vaudois (+2%) ou de l’évolution démographique (+2 à 3% par an). Le Gouvernement ne peut donc prétendre avoir ses dépenses sous contrôle. Les recettes, quant à elles, sont sous-évaluées depuis plusieurs années dans les budgets. Cette pratique aide probablement à freiner les appétits dépensiers de certains, mais elle cache et fait durer une fiscalité excessive.

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