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Loup, y es-tu?

Benoît de Mestral
La Nation n° 2202 3 juin 2022

A l’automne 2020, le peuple a rejeté la révision de la loi fédérale sur la chasse (LChP), fruit d’un important compromis qui avait acquis le soutien de la Ligue vaudoise1. Le Conseil fédéral faisait alors état de huit meutes établies en Suisse pour un total d’environ huitante loups. A la fin 2021, Pro Natura recense treize à quinze meutes pour cent cinquante loups; en avril 2022, le «Groupe Loup Suisse» annonce l’existence de seize meutes. Les huitante loups de 2020 tuaient «300 à 500 chèvres et moutons», les cent cinquante de 2021 ont tué 853 animaux de rente, dont des bovins.

Fin 2021, le Conseil fédéral affirmait qu’en matière de protection des espèces, la Suisse pouvait supporter environ vingt meutes si elles étaient bien réparties sur le territoire2. Au vu de la progression récente de la population de loups, il faut s’attendre à ce que cette limite soit atteinte cette année, ou éventuellement l’an prochain.

L’urgence de la situation est constatée par une partie au moins de l’Assemblée fédérale: on compte trente-deux motions, initiatives, interpellations et questions l’an dernier, et déjà huit cette année. La plupart des solutions proposées sont malheureusement centralisatrices, trop uniformes, voire loufoques: déplacer des loups en plaine afin d’uniformiser leur occupation du territoire3, mobiliser le service civil pour surveiller les troupeaux4, même réglementer les chiens de troupeaux, qui semblent causer plus de soucis aux Verts que le loup5… Comme solution d’urgence pour l’estivage 2022, le budget fédéral a été modifié, afin de permettre la dépense de 5,7 millions de francs supplémentaires en mesures préventives, soit environ quarante mille francs de barrières électriques par loup.

Les Commissions de l’environnement des deux Chambres semblent s’être alignées sur des projets d’allègement des conditions d’obtention d’une autorisation de tir au niveau fédéral6, et ont honni la motion proposant de permettre aux Cantons de protéger leur population contre le loup7; la nouvelle motion proposant de créer, en accord avec les Cantons, des zones «zéro loup» où le tir serait autorisé sans trop de tracasseries8, subira probablement le même sort.

Si le loup a été aperçu dans presque tous les cantons, les meutes ne sont établies que dans cinq d’entre eux: Vaud, Valais, Tessin, Glaris et Grisons. Ces cinq cantons se retrouvent aujourd’hui les mains liées face à un problème urgent, qui deviendra vraisemblablement critique d’ici un an. Le Conseil fédéral affirme ne pas envisager de nouvelle révision de la LChP et vouloir ne régler la question que par des modifications de l’ordonnance, en raison du refus de son projet de loi par le souverain9. L’échec en référendum n’a jamais empêché les autorités fédérales de reprendre immédiatement le travail sur le projet rejeté, comme elles l’ont notamment fait pour «l’e-ID» l’an dernier. Il est urgent que le Conseil fédéral abandonne cette attitude défaitiste et travaille avec l’Assemblée fédérale pour réformer de manière cohérente la gestion du loup, c’est-à-dire pour en confier la gestion aux Cantons.

Notes:

1  Cf. l’article de M. Olivier de Mestral dans La Nation no 2155 du 14 août 2020.

2  Réponse à l’interpellation no 21.4063 de M. Martin Landolt (Le Centre, GL).

3  Interpellation no 21.3437 de M. Franz Ruppen (UDC, VS).

4  Motion no 21.4371 de M. Michael Graber (UDC, VS).

5  Interpellation no 22.3232 de Mme Adèle Thorens Goumaz (Les Verts, VD).

6    Initiative no 21.502, CEATE-CE.

7  Motion no 21.499 de M. Jean-Pierre Grin (UDC, VD).

8  Motion no 22. 3478 de M. Fabio Regazzi (Le Centre, TI).

9  Réponse à la question no 21.1059 de M. Piero Marchesi (UDC, TI).

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