† François Perret
François Perret avait le don, assez rare, de s'engager avec un élan passionné pour ce qu'il aimait et, simultanément, d'en sourire avec toujours cette étincelle d'amusement au coin de l'œil. L'enthousiasme avec feu, le plaisir comme un jeu. Il émaillait sa conversation (on ne s'ennuyait jamais avec lui) d'anecdotes pittoresques ou de portraits gentiment moqueurs de personnalités du Canton; mais le badinage allait de pair avec une grande exigence dans le souci du travail et dans la quête de la beauté.
Parmi ses passions, la musique prenait une place de choix; cet excellent flûtiste – n'avait-il pas bénéficié de conseils d'Aurèle Nicolet, excusez du peu! – travaillait son instrument sans relâche. Au camp de Valeyres, levé avant les autres, il s'exerçait dès l'aurore. Au service militaire, la batterie du capitaine d'artillerie Perret pouvait entendre sa flûte sonner dans le cantonnement.
Vint le jour où, la famille s'étant installée à Yverdon dans une propriété dotée d'un vaste verger, il s'est subitement voué à l'arboriculture avec tant d'ardeur qu'il en est rapidement devenu un expert.
Yverdonnois de naissance et de cœur, il a œuvré avec clairvoyance et énergie pour sa ville, en organisant avec son épouse Adine les concerts du dimanche au temple (suivis de mémorables après-concerts, jusque tard dans la soirée, dans leur jardin où nos amis savaient si bien recevoir), en présidant le Conservatoire du Nord vaudois, en rassemblant plusieurs centaines de milliers de francs pour la restauration des orgues du temple, dont il fut la cheville ouvrière.
Ce juriste a accompli l'essentiel de sa carrière professionnelle au Centre Patronal, où sa rapidité d'esprit et sa capacité d'adaptation lui ont permis de remplir des fonctions très variées. Il s'est surtout illustré en conduisant les campagnes de votation avec allant, habileté et souvent un certain panache. Combien de comités d'action a-t-il formés et animés pour soutenir les meilleures causes… et combattre les pires! Si le sort des urnes n'avait pas été favorable, sans s'attrister, il concluait son rapport de mission par la formule d'une collection de livres pour la jeunesse: «En route vers de nouvelles aventures!» Ces campagnes le confrontaient souvent aux «taxes incitatives», dont l'officialité grève le bon peuple pour l'éduquer dans le sens du politiquement correct; ce qui avait inspiré à notre collègue cet adage hélas toujours actuel: «Péché taxé est à moitié pardonné.»
Au sein de notre Mouvement, notre membre et ami a notamment présenté maint exposé avec talent oratoire, précision et drôlerie, collaboré à notre journal, organisé durant plusieurs années les rencontres des Amis de la Ligue vaudoise.
Nous exprimons notre sympathie à son épouse et à sa famille et nous honorerons sa mémoire.
Au sommaire de cette même édition de La Nation:
- 1’044’510 habitants – Editorial, Félicien Monnier
- Occident express 84 – David Laufer
- La tentation du désespoir – Lars Klawonn
- Serviteur du livre – Jacques Perrin
- Qui sommes-nous? – Olivier Delacrétaz
- La défense n'est pas qu'une affaire d'avions! – Edouard Hediger
- Fragmentation – Alain Charpilloz
- Les mandarin-e-s s’expriment – Le Coin du Ronchon